Hella trainait des pieds en entrant dans le commissariat, comme à chaque fois. Cependant il y avait un petit côté différent cette fois, quelque chose qui changeait dans sa façon d’être. Elle n’était pas vraiment dans son assiette, n’arrivait à remonter une pente qu’elle avait dévalée à toute vitesse sans même s’en rendre compte. Elle n’avait rien vu venir, ça lui était juste tombé dessus, comme ça, piouff ! Elle gardait la tête haute parce qu’elle devait donner le change, parce qu’il était hors de question de paraitre vulnérable, encore moins devant les gens d’ici. Elle avait passé un temps fou à faire chier tout le monde du mieux qu’elle pouvait, enchainant les chaperons, elle n’allait quand même pas se laisser aller devant eux ! D’ailleurs en parlant de chaperon elle culpabilisait un peu à cause du dernier qu’elle avait eu. On lui avait assuré que ça n’avait rien à voir avec la fusillade mais le timing correspondait. Elle espérait qu’Alix n’avait pas eu trop de problème à cause d’elle, et qu’elle ne s’était pas fait viré, même si on lui avait dit que non. Pourtant ce n’est pas faute d’avoir voulu porter la responsabilité sur elle, de dire qu’elle s’était planquée dans la voiture et qu’Alix n’avait pas eu le choix. En même temps, Hella n’était pas certaine qu’on l’ait cru. Peu importe, elle n’avait pas envie de se prendre la tête avec ça, pas maintenant.

« Hella ? »
« Oui… »
« Il faudrait que tu ailles dans la salle 6 en attendant de voir comment on va s’organiser pour toi. »
« Laissez-moi deviner, personne se dévoue pour s’occuper de moi ? je peux rentrer chez moi aussi, rester assise sur une chaise je le fais très bien de là-bas. »
« Dans la salle 6, s’il te plait. »

Hella afficha un sourire triomphant parce qu’on ne savait plus quoi faire d’elle ici. Une sorte de victoire selon elle, même si elle était incapable de s’en féliciter comme elle le devrait. Quelque chose ne tournait pas rond chez elle. Elle en était consciente mais elle ne savait pas comment se remettre à avancer. Passer sa vie à se construire des forteresses qu’une personne – deux, en réalité – fracasse aussi facilement c’était perturbant. Elle n’était pas certaine qu’il existe un manuel qui explique « comment se remettre d’avoir été laissée pour morte comme une guirlande électrique sur un portail. » et encore moins un « Mon prof m’a enfermé chez moi, comment je dois réagir ? ». Elle n’avait pas envie de s’apitoyer sur son sort, encore moins qu’on le fasse pour elle. Il fallait juste qu’elle trouve une solution et qu’elle passe à autre chose. C’était la seule chose à faire, où alors s’envoyer sous les rails d’un métro mais elle n’était pas fan de cette dernière option.

Bref, elle se traina jusqu’à la salle indiquer, s’installa, à moitié avachie sur une chaise en se demandant combien de temps elle allait devoir poireauter ici à rien foutre. Hella n’avait pas oublié un de ses objectifs dans cet endroit : fouiller les fichiers, savoir s’il existe quelques choses sur ses parents. Alors ça la saoulait de rester planté là, alors qu’elle pourrait faire tellement d’autres choses. La porte s’ouvrit… En fait, elle aurait préféré qu’on la laisse tranquille un peu plus longtemps. Bonjour, je m’appelle Hella et je ne sais absolument pas ce que je veux dans la vie !

Pour en revenir à ce type, Jack, il n’avait pas besoin de dire qu’il était un foutu psy. Il avait son dossier, un calepin, ne lui servait pas de « mademoiselle Healt », genre, on est pote depuis toujours. C’était FORCEMENT un psy, ce qui eut pour but de lui faire tirer une tronche blasée. On l’avait trainé dans cette pièce pour voir un putain de psy. Il allait falloir qu’elle songe à casser les dents de cette espèce de blonde à talons qui se fait appeler Calie, juste pour l’avoir trainé ici. Elle écouta tout le laïus du type en posant son regard sur lui. Sérieusement, c’était un crime d’avoir un psy aussi sexe, réflexion dont elle s’étonna elle-même. Il était là pour l’évaluer sur deux choses. Comme c’est étonnant.

« Laissez-moi deviner. Elle fit semblant de réfléchir. Mon contrôleur judiciaire ? C’est ça, hein ? Ouais, c’est forcément ça. Je propose qu’on fasse super simple : Je vais bien, j’ai juste eut besoin de repos. Elle fit semblant de tousser. Les maladies, une vraie plaie. Pour ce qui est de ma sortie avec l’agent Alix, j’ai rien à en dire, sérieusement, c’était carrément mieux que de rester derrière un bureau, puis maintenant je peux me la raconter en cours devant mes potes avec ma blessure de guerre. »

C’était vrai, elle avait trouvé ça plus intéressant que de rester derrière un bureau. Sérieusement, elle ne le vivait pas mal du tout. Une balle dans l’épaule s’était tellement dérisoire à côté de ce qu’elle avait vécu devant l’institut. Une vraie partie de plaisir en comparaison.

« Du coup, on a fini ? Je peux partir ? »

Bin quoi ? Elle ne perdait rien à essayer.

Vraiment ? C’était vraiment professionnel de dire qu’on veut que ça dure juste pour rembourser ses frais ? Hella le regarda un peu étonné parce qu’elle n’arrivait pas à déterminer si ce psy était sérieux ou si c’était pour déconner. Il avait juste balancé ça, naturellement, que s’en était un peu perturbant. Ajouté à ça la posture qu’il était en train de prendre. Ok, en fait il devait tout juste sortir de l’école. Il n’était même sortis dans les derniers de sa promotion et on ne lui avait pas laissé le choix de son affectation – ça se faisait ça, pour les psychologues ?! – et, voilà, il se retrouvait ici complètement blasé par son boulot. Hey, sans déconner, c’était elle qui était censée tenir le rôle de la blasée de la vie, pas lui ! Et puis merde il faisait chier avec son putain de rapport à faire. Il ne pouvait pas juste gribouiller des trucs sur son calepin, dire qu’elle avait une bonne raison d’être absente et plus personne ne serait obligé de venir ici. Y a rien qui collait avec ce mec, son air complètement blasé mais une volonté de bien faire son travail. Elle crut même que c’était lui qui avait besoin d’un psy l’espace d’un court instant. Puis, LA question…

Hella avait quitté son air étonné, celui où elle se demandait à qui elle avait à faire. Il avait posé une simple question, qu’il n’avait pas pu lire quelque part. Elle n’en avait pas parlé et doutait que l’institut l’ai fait aussi – déjà qu’ils se cachaient des choses entre eux. En une seule et unique question, et les explications qui allaient avec, Hella comprit qu’elle n’avait pas le dernier de la classe. Putain, elle avait été stupide, elle aurait pu le comprendre. Il ne travaillait pas ici, il était venu, c’était un consultant. On ne prenait pas n’importe quel consultant, non ? Il n’était pas blasé de son travail, au contraire, il savait parfaitement ce qu’il faisait. Elle le détestait parce qu’elle s’était armée comme elle avait pu avant de venir aujourd’hui mais elle ne s’était pas préparer à ce genre de chose.

Qu’est-ce qui s’est passé à l’institut ? Elle sentait déjà le mur qu’elle s’était fabriqué s’effriter. Non, non, et non, ça ne pouvait pas se passer comme ça. Et il enfonça le couteau dans la plaie, énumérant tout ce qu’elle avait pu vivre, tout ce qui ne l’avait pas ébranlée, tout ce pourquoi elle s’était relevée et avait continué son chemin. Alors, qu’est-ce qui a bien pu se passer là-bas pour que tu n’ailles plus nulle part ? Sa bouche s’ouvra, aucun son ne sorti. Pas ce sujet, pitié. Pas ce sujet. Elle n’en voulait pas, elle n’était pas capable de le prendre comme si rien ne s’était passé, elle n’était pas capable de s’en détacher. Pas encore. Pourquoi rien ne venait, allez, juste un petit truc ironique qui prouverait que rien ne s’était passé, que tout allait bien, qu’elle allait bien. Elle ne pouvait plus se rattraper, elle le savait mais elle en avait tellement envie. Revenir en arrière, trouver un truc à dire. Elle ne trouvait rien, il reprenait déjà la parole. Bordel. Tout venait de lui échapper en une seule question. Lamentable. Mais les premiers qu’il annonça lui fit secouer la tête, presque choquée par ce qu’il sous entendait.

« Non ! Non, il ne s’agit pas de ça. »

Elle avait du mal à croire qu’on puisse penser qu’elle puisse avoir ce genre de problème avec un professeur. L’institut était un peu le monde des bisounours, ou tout le monde s’inquiète si on arrive mal réveillée. C’était peut-être exagérer mais l’idée était là. Ce n’est qu’après qu’elle réalisa ce qu’elle venait de dire. Il ne s’agit pas de ça. Ça voulait bien dire qu’il y avait autre chose. Est-ce que, si elle se baffait devant lui, il noterait qu’elle était bonne pour être internée. Non, parce qu’elle avait déjà donnée là-dedans et n’avait aucune envie d’u retourner. Le problème c’est qu’elle se sentait prise au piège de ce qu’elle avait dit, toute seule, comme une grande. Sans parler de ce foutu contre-rendu à communiquer à son contrôleur judiciaire.

« Rien à voir avec les prof de l’institut, enfin… c’est plus compliqué que ça. »

Elle n’avait pas posé son regard sur lui mais, si elle le faisait, elle imaginait qu’il la regarderait de façon à lui rappeler qu’il était payé à l’heure alors, il avait le temps d’écouter quelque chose de compliqué. Bien sûr, elle n’avait aucune certitude sur ce regard vu qu’elle ne voulait pas le regarder à ce moment précis. De toute façon, même sans un regard particulier il lui demanderait des explications, c’était son boulot après tout. Elle détestait le psychologue, plus que jamais aujourd’hui. Relevant le visage vers lui, elle décida de se lancer dans des explications approximatives.

« Je… Pour faire simple, j’ai été prise pour cible par un type qui voulait atteindre et faire passer un message à quelqu’un de l’institut. Et, convalescence oblige, je suis restée chez moi. »

Il fallait que ç suffise comme explication parce qu’elle ne voulait pas que l’institut est des problèmes à cause d’elle. C’est d’ailleurs pour ça qu’elle n’avait pas dit que la personne visée était un prof, et qu’elle n’avait pas dit que ce prof en question était venu remuer le couteau dans la plaie parce qu’on lui avait caché des informations à l’institut. En fait c’était un putain de gros bordel.

Ce qui était chiant avec lui, c’est qu’elle ne pouvait pas lui sortir quelque chose comme : « Bravo, vous auriez pu être psy »… Il l’était, ça réduisait son champ de réflexion possible. Alors à défaut de pouvoir sortir quelque chose elle lui balança un sourire, comme pour le féliciter de manière ironique. Bien sûr que ça avait un rapport avec un prof, il ne lui apprenait rien, ce n’était pas le peine de le signaler ! Elle commençait à se demander si ce type ne lisait pas dans les pensées – l’idée d’être un livre ouvert pour quelqu’un ne lui plaisait guère – parce que voilà qu’il partait dans une tirade expliquant le secret professionnel et le fait qu’elle pouvait lui parler sans craindre qu’il n’aille le répéter à quelqu’un d’autre. Hella préférait s’enfoncer dans sa chaise, croiser les bras et faire comme si ça ne changeait rien. Solution de repli stratégique, le temps pour elle de savoir si elle devait donner plus d’explication ou non.

Après tout, il était probablement la personne la plus qualifié pour l’aider et se trouvait être extérieur à tout ce qu’elle avait pu vivre. Elle n’aimait pas cette idée mais elle devait bien se rendre à l’évidence : toute seule, elle ne s’en sortait pas. Jack mettait le doigt sur ses erreurs de paroles qui en disait plus que ce qu’elle n’avait voulu le faire, c’est sûrement ça qui venait de la décidé à ouvrir la bouche, donner plus de détail, lui expliquer. Mais avant qu’elle ait pu dire quoique ce soit, il baissait les bras, ne voulait pas insister si elle ne voulait pas en parler. Bien sûr, qu’il devait insister, elle était à deux doigts de cracher des trucs à dire et lui, en une phrase, venait de la dissuader complètement. Abrutit. Puis tout se mit à tourner dans le mauvais sens.

Il déraillait, parlait de chose qu’il ne savait pas, mettait des hypothèses complètement infondées, allant presque à dire ouvertement qu’elle dramatisait sur quelque chose qui n’était pas si grave. Elle ouvrit la bouche, étonnée, choquée. Comment… Comment est-ce qu’il pouvait dire quelque chose comme ça ? Il n’avait pas été là, il n’en savait rien. Déjà qu’elle n’aimait pas être dans cet état mais en plus, qu’on lui dise qu’elle l’était pour des conneries ça la mettait carrément hors d’elle.

« Juste menacé ? Elle laissa échapper un rire nerveux. Si on considère qu’être frappée, laissé pour morte, limite éventrée et accrochée à un portail. Alors ouais, il m’a juste menacé. Elle parlait, hurlait sans même s’en rendre compte. Mais, il l’avait énervé et elle était plutôt susceptible ses derniers temps. Et puis j’sais pas moi, vous êtes quand même avoir lu mon dossier, vous savez que je suis dans CET institut alors peut-être bien que je peux guérir plus rapidement que les autres et que c’est pour ça que j’ai aucune trace, ce qui n’enlève rien à ce qui s’est passé ! »

Ce n’était pas son pouvoir, elle le savait mais ce n’était pas le cas de Jack. Elle savait que son pouvoir n’était pas inscrit dans son dossier, elle était juste connue comme mutante. Il y a un truc qu’elle ne supportait vraiment pas, c’est qu’on puisse considérer qu’elle dramatisait tout, il y plein de chose qu’elle pouvait laisser passer mais, ça, ça n’en faisait pas partie. Et puis d’abord il était qui pour la juger. Ca l’énervait parce qu’elle avait d’abord pensé qu’il était nul en tant que psy, avant de penser que c’était justement l’inverse et, là, il recommençait à agir comme un débutant. Putain… Un truc s’alluma dans son cerveau : il n’était pas en train de jouer les débutants, en fait il savait très bien ce qu’il avait dit et elle songea à ce qu’elle venait de balancer en réponse. Il l’avait juste fait parler et elle avait balancé un tas de chose sans même s’en rendre compte sur le moment. Elle ne savait pas vraiment combien de temps elle était restée la bouche ouverte en comprenant cela, sans savoir si elle devait le détester ou se dire qu’il était doué. Les deux n’étaient pas incompatibles après tout.

« Vous me l’auriez demandé, je vous l’aurais dit, y avait pas besoin d’en arriver là ! »

Comprendre ce qui venait de se passer l’avait fait se calmer, reprendre un ton plus normal niveau sonore. Ca ne l’empêchait pas d’être sérieuse dans ses propos, elle avait pris la décision de lui parler avant qu’il ne lui balance ce genre de chose, elle l’aurait fait. En venir là avait été, pour elle, complètement inutile et plutôt violent pour sa petite tête. Et, si elle voulait continuer à parler, elle préférait se taire pour le moment, comme si elle cherchait à avoir une explication à ce qu’il venait de faire. Besoin de comprendre, c’était plus fort qu’elle.

Hella estima avoir bien fait d’attendre une explication qui ne tarda pas à venir. Alors, comme ça, il voulait juste juger de la manière dont elle vivait les choses ? Elle ne savait pas si c’était ça qui l’énervait les plus, ou si c’était le fait qu’il avait préféré employé ce moyen parce qu’il était déjà capable de la définir. Et, en plus, il se payait le luxe d’avoir raison à son sujet. Est-ce que tout était écrit sur son front ? En y réfléchissant le problème n’était pas de le détester mais, surtout, de ne pas réussir à le faire. Au fond d’elle quelque chose lui disait qu’il pouvait l’aider parce qu’il avait su comment si prendre, parce qu’il comprenait ce qu’elle tentait désespérément de cacher à tout le monde. En temps normal, elle avait envie de croire qu’il aurait galéré un peu plus, parce qu’elle n’aurait pas agi de cette manière si elle n’était pas psychologiquement vulnérable. Mais ça ne servait à rien de ce demandé comment les choses auraient pu se passer. C’était fait.

Elle ne savait même pas quoi lui répondre, parce qu’il avait raison et de le dire à voix haute ce n’était pas son truc. Elle préféra se taire, le laisser continuer et voir où allait mener leur entrevu. Elle n’eut pas longtemps à attendre. L’institut. Comment elle le vivait ? Elle se mise à sourire quand il expliqua une nouvelle fois que ce n’était pour leur faire procès. Elle l’avait déjà compris la première fois qu’il avait fait le point sur ça, pas la peine de lui redire. Hella baissa les yeux, un court instant, sur le bureau devant elle en s’interrogeant elle-même sur la manière dont elle percevait l’institut, de la manière dont il avait réagi. Jack le saurait à un moment où à un autre, où il le comprendrait alors elle ne voyait pas de raison de se taire. Le secret professionnel était quand même quelque chose de merveilleux dans ce genre de cas.

« Oui, ils sont au courant. Ceux qui m’ont trouvé l’étaient en tout cas mais, apparemment, ils ont préférés taire certain élément à la personne qui était visée. Du coup, c’est cette personne-là qui est venue me voir pour me demander les détails. J’ai pas été très coopérative, en réalité, ce qui l’a poussé à se faire plus insistant dans ses questions et… je ne l’ai pas super bien vécu en fait. »

Elle ne voyait pas vraiment l’intérêt de dire qu’il avait été jusqu’à chez elle, à l’enfermée à l’intérieur et la menacer de faire entrer un télépathe dans sa tête qu’il avait déjà fait venir Là n’était pas vraiment le sujet. Elle plissa légèrement les yeux en se disant, que si elle en voulait à Logan, elle en voulait aussi à l’institut de ne pas lui avoir tout dit à lui. Ça aurait évité qu’il débarque chez elle comme ça.

« Je suppose que je leur en veut parce que ce n’était pas moi de redonner les détails de ce qui s’était passé, ils auraient dû relayer l’information. Enfin, je sais pas, je me dis que si ils avaient su comment ça allait se passer, ils n’auraient pas gardé ça secret mais, j’sais pas, ils auraient dû le prévoir. »

Ouais, en fait elle ne savait pas grand-chose. Le plus logique aurait sûrement été d’en vouloir à Daken, c’est lui qui avait foutu la merde. Elle lui en voulait, fallait pas rêver, elle lui en voulait plus que tout le reste mais, elle ne savait pas qui il était, elle ne pouvait rien faire contre lui, même pas espérer une vengeance. Pas pour le moment, il la mettrait au tapis en moins de deux. C’était plus facile d’en vouloir à des gens qui étaient présents, qu’elle pouvait affronter parce qu’elle savait qu’ils ne lui feraient rien, eux.

« Mais, en même temps, j’suis pas certaine d’avoir le droit de leur en vouloir parce que, c’est quand même grâce à l’institut si je suis dehors aujourd’hui »

Ça lui semblait être une information importante parce que, même si elle n’allait pas leur dire, elle était quand même plus que reconnaissante de ne pas être dans le fond d’une cellule. Alors les juger au moindre écart n’était peut-être pas la meilleure façon de faire. Hella soupira, parce qu’elle n’en savait rien. Est-ce qu’elle avait envie de leur en vouloir, ou est ce qu’elle leur en voulait vraiment ? Est-ce qu’elle culpabilisait de leur vouloir après ce qu’ils ont fait pour elle ? Ou est-ce qu’elle essayait de leur trouver toutes les excuses du monde pour ne plus leur en vouloir, comme pour les remercier ? c’était un bordel pas possible dans son cerveau, elle avait juste envie que ça cesse, qu’elle sache ce qu’elle pense réellement et pouvoir travailler dessus pour, enfin, pouvoir avancer. Elle secoua la tête en relevant la tête vers Jack.

« Franchement, je ne sais pas quoi penser. »

Désolé… désolé ? Elle l’imaginait déjà baisser les bras, lui dire que ce n’était pas son problème – ce qui était vrai – et qu’il ne pouvait rien faire pour elle. Hella se sentait déjà déçue, elle lui avait parler parce qu’elle avait besoin d’aide et, lui, il était désolé. Sa déception dû se lire sur son visage mais, il avait déjà continué sa phrase. Elle ne lui avait même pas laissé le bénéfice du doute, comprenant son mot de travers, sans chercher à voir plus loin. Ses explications venaient seulement de lui arriver au cerveau, avec un train de retard, et fallait encore qu’elle intègre ces nouvelles données. Oui, il était désolé mais pas de la manière dont elle l’avait envisagé. Il ne la laissait pas tomber, il voulait qu’elle réfléchisse à certaine chose, qu’elle se pose les questions de manières différentes et, surtout, qu’elle ne lui donne pas de réponse maintenant. Une notion qu’elle se força d’intégrer rapidement parce qu’il avait à peine posé une question, qu’elle pensait déjà avoir un avis dessus.

Ça n’aurait rien changé si l’institut ne l’avait pas sorti de là où elle était. Première pensée. Rapidement contrecarré. Bien sûr, que si, ça avait tout avoir avec ça. Étrangement, elle dessina un très léger sourire sur ses lèvres parce qu’elle l’aimait bien. Enfin disons qu’il ne lui était pas antipathique. Il comprenait ce qui n’allait pas, mettait le doigt dessus et, surtout, il n’émettait pas de jugement du style « mais ils sont débiles à l’institut, on ne fait pas ce genre de chose », en fait, il tenait son rôle. Et, surtout, il ne lui disait pas qu’il était d’accord avec tout ce qu’elle disait comme pour chercher à le mettre en confiance et la faire parler plus longuement. Méthode qui, de toute façon, ne fonctionnait pas avec elle.

Elle savait parfaitement que c’était un psy, qu’elle n’était qu’une patiente comme les autres et que, dans le fond, il s’en contre foutait de ses histoires. Il était payé pour ça. Mais il le faisait bien et, au fond, elle avait envie de croire qu’il était là pour elle, pour l’aider à sortir la tête de l’eau. Une grande première pour elle mais il était là, au moment où elle avait besoin d’aide. On lui aurait collé ce Jack avant toute cette histoire que les choses ne se seraient vraiment pas passé de cette manière. Aussi doué qu’il puisse être, elle avait construit tellement de barrière qu’elle aurait tenu le choc. Aujourd’hui, ça lui était impossible. Trop fragile. Mais, elle s’en remettrait, elle le savait. Elle nota toutes ses questions mentalement, sans pouvoir y répondre parce qu’il l’avait demandé.

« Ça veut dire que je vais devoir revenir pour vous donner les réponses ? »

Elle avait fait mine d’être contrarié par cette idée même si ce n’était pas ce qu’elle ressentait. Elle voulait bien revenir, elle voulait bien exposer ce qu’elle pensait de tout ça vu d’un autre angle. Mais, elle savait aussi que ce sentiment ne durerait peut-être pas. Si elle arrivait à se relever alors, elle n’aurait pas de raison de le revoir, elle reprendrait sa vie, ses murs, ses protections et redeviendrait cette gamine horrible qui n’a pas envie de parler d’elle, qui n’a pas envie qu’on la connaisse, qui n’a pas envie de s’attacher à qui que ce soit et, surtout, qui n’a pas besoin d’aide.

« Du coup, je peux partir maintenant, vu que je ne dois pas répondre ? »

Elle avait juste envie d’être forte, de montrer un semblant de dignité genre « j’ai pas envie d’être là, alors si je peux partir, c’est cool », ce qui n’avait rien à voir avec l’attitude qu’elle avait eu jusque-là. Mais elle était comme ça, besoin de se reprendre en main tout en sachant qu’elle s’écroulerait à nouveau en rentrant chez elle. Hella n’aurait jamais misé sur une telle tournure des choses, comme elle s’étonna du fait qu’il n’avait pris aucune note. C’était cool, parce qu’elle ne voulait pas de trace écrite de ce qui venait de se dire et parce qu’en plus, ça avait donné l’impression qu’il l’écoutait et non pas qu’il était concentré sur un papier à remplir ou des notes à prendre.

Il n’avait plus qu’à lui donner son accord et elle quitterait cette pièce rapidement, juste histoire de dire qu’elle était contente de le faire. Une vraie contradiction sur pattes cette fille. Ce qui était certain c’est qu’elle ne voyait en jack qu’un psy, tout ce qu’il y a de plus normal. A aucun moment elle aurait devinée pouvoir être un intérêt pour lui, ou pour un groupe dont elle avait seulement entendu parler dans les couloirs de l’institut. Si elle venait à l’apprendre elle s’en voudrait sûrement de s’être confié à la mauvaise personne. Ou, alors, elle y verrait un moyen de changer de voix, de voir d’autres horizons et de quitter l’institut.